L’opposition farouche des jurys est l’obstacle infranchissable que les formes nouvelles de la peinture doivent affronter au XIXe siècle pour se faire connaître. Une sorte de «Mur de l’Atlantique» les sépare du public. Tentons par conséquent d’analyser le fonctionnement du Salon, et les raisons qui en dénaturent le rôle à cette époque. Cet antagonisme irréductible survient à un moment de grands bouleversements de société et où des changements décisifs se produisent dans l’art de peindre, alors que la peinture officielle se fige parallèlement dans l’académisme.
A l’origine, Richelieu crée, en 1634, l’Académie française et fonde une politique d’orientation et de surveillance de toutes les disciplines intellectuelles et créatrices. Cette politique est poursuivie par Mazarin qui crée l’académie royal de peinture et de sculpture en 1648. Colbert rationalise le projet académique qui devient un élément important de sa politique. C’est lui qui fonde en 1667 le Salon, réservé aux artistes membres ou agrées par l’Académie. Il se déroule pendant la Semaine Sainte. A la Révolution, il est accessible à tous les artistes car la Convention a supprimé toutes les académies en 1793. Puis, en 1798, il est placé sous le contrôle d’un jury d’admission choisi par le gouvernement. Un jury ne dépendant que du Salon existait néanmoins depuis 1747.
Ce n’était pas sans risques. A treize ans de la Commune et de sa sanglante répression, vouloir se libérer de la tutelle d’un jury, rejeter tout à la fois le principe de patronage et la pratique de la cooptation en échange de la soumission aux normes établies, représentait un acte courageux.
à l’heure où le bulletin de la Paroisse était obligatoire pour l’obtention d’un emploi, «Ni jury, ni récompenses» le slogan des impressionnistes, devenait le mot d’ordre de ces peintres révolutionnaires. Ils abandonnaient la condition de «refusé» qui fut pendant le XIXe siècle celle de tout artiste novateur, pour affronter la liberté qui n’était guère plus facile à assumer.
Mais au moins avaient-ils l’espoir d’intéresser la critique, de montrer leurs oeuvres et finalement de les vendre. Dans une période où il y avait peu de galeries, l’artiste novateur sortait enfin du cercle infernal où sa condition infamante de «refusé» équivalait à une condamnation à l’exclusion et à la misère
Salon de la Jeunesse Dessin de Duché de Vancy, mai 1780 (Musée Carnavalet) “Vue pittoresque de l’exposition des tableaux et dessins dans la place Dauphine le jour de la petite feste de Dieu” Le Salon en plein air peut être considéré comme l’ancêtre du Salon des Indépendants
Le Salon de 1785 Pietro Antonio Marini (Gravure. B.N.) Saint Luc, patron des peintres, est à l’honneur en ce jour du 25 août. C’est le jour de la Fête de Saint Louis et celle du Roi de France. Nous sommes au Salon Carré du Louvre. Le Salon dure 1 mois, il est ouvert à tous publics, sans distinction de rang, de fortune, d’état, de sexe ou d’âge. En 1787, 22 000 catalogues ont été vendus et 90 000 personnes ont visité l’exposition d’environ 200 oeuvres présentées en hauteur, sur six rangées compactes.
Quatre heures au Salon. François BIARD (1798 – 1882) 1847 Musée du Louvre
Auteur : Jean Monneret,
Catalogue raisonné du Salon des Indépendants 1884-2000.
Edition Eric Koehler, novembre 2000
Les articles de Jean Monneret
Chaque semaine découvrez de nouveaux articles sur l’histoire de l’art et du Salon des Artistes Indépendants par Jean Monneret
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